Créé le 22-10-2012 à 17h30 - NOUVEL OBS Mis à jour à 17h30
ANTAKYA, Turquie (Reuters) - L'afflux de réfugiés syriens en Turquie attise les tensions dans la province d'Hatay, pourtant réputée pour sa tolérance et la position d'Ankara y dresse les coreligionnaires locaux de Bachar al Assad contre leur gouvernement.
Comme les insurgés syriens, les réfugiés sont pour la plupart de confession sunnite et leur présence n'est pas du goût des Turcs d'origine arabe issus comme le président syrien de la minorité alaouite.
Ces derniers sont en outre de plus en plus critiques envers une administration turque qui a pris fait et cause pour les rebelles, parmi lesquels figurent des extrémistes islamistes.
Pour la plupart des alaouites de la province d'Hatay, qui affiche une mixité confessionnelle sans équivalent dans une Turquie très majoritairement sunnite, le conflit n'affecte pas encore les relations entre les différentes communautés.
Mais certains craignent des représailles et d'autres font d'ores et déjà état d'incidents entre sunnites et alaouites. Selon l'un d'eux, des villages à dominante alaouite auraient même commencé à stocker des armes.
Le discours des autorités syriennes, qui parlent d'une campagne "terroriste" menée au détriment des minorités religieuses, trouve un écho particulier chez les alaouites de Turquie. A leurs yeux, Ankara joue la carte confessionnelle en apportant son plein soutien aux représentants de l'opposition et aux déserteurs, dont certains ont trouvé refuge en Turquie.
"Le gouvernement turc s'imagine-t-il vraiment que tout le monde l'aimera quand ce sera fini? La guerre ne débutera vraiment qu'avec le départ d'Assad", dit Aydin, un commerçant alaouite d'Antakya, l'Antioche biblique, chef lieu de la province d'Hatay.
"Le gouvernement joue un jeu sectaire ici. Il essaie de diviser notre communauté. Jusqu'ici, être sunnite, alaouite ou chrétien n'avait aucune importance, poser la question était déjà déshonorant, mais les choses changent", regrette-t-il.
ANIMOSITÉ
Le gouvernement turc semble toutefois soucieux de désamorcer les tensions religieuses. Des réfugiés en situation irrégulière auraient ainsi été invités à quitter la province de Hatay et des mesures prises pour empêcher les rebelles de s'y replier.
Une rencontre entre représentants de l'insurrection prévue à Antakya le mois dernier a en outre été annulée et l'Armée syrienne libre (ASL) a fait savoir que son état-major, qui se trouvait dans la province, avait été relocalisé dans l'un des secteurs "libérés" de Syrie.
La région, qui faisait jadis partie du territoire syrien, est en proie aux tensions communautaires depuis que le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, autrefois proche allié d'Assad, lui a enjoint l'an dernier de se retirer. La situation s'est ensuite détériorée avec l'arrivée de dizaines de milliers de réfugiés fuyant les combats du nord de la Syrie.
Cent mille d'entre eux vivent désormais dans des camps de fortune côté turc et des dizaines de milliers d'autres sont en situation irrégulière dans la zone frontalière.
"Il y a tellement d'étrangers ici qu'on ne sait même plus qui ils sont. Ils errent avec leurs longues barbes. Certains ne sont même pas Syriens. Un regard suffit pour se rendre compte que ce sont des tueurs. Est-ce qu'on veut vraiment qu'ils accèdent au pouvoir en Syrie?", s'indigne Aydin.
L'animosité vaut aussi en sens inverse. Ainsi, un opposant syrien chargé de la coordination des soins aux réfugiés a-t-il refusé de laisser une infirmière s'occuper de l'un des blessés qu'il avait conduits dans un hôpital local.
"Je ne veux pas qu'elle le soigne. C'est une alaouite. Ce sont tous des espions", a-t-il déclaré.
Près de la moitié des 1,5 million d'habitants de la province d'Hatay sont de confession alaouite. La région a été rattachée à la Turquie après un référendum organisé en 1939, alors que la Syrie était sous mandat français. Elle possède également des communautés catholique, protestante, orthodoxe et juive.
Jean-Philippe Lefief pour le service français, édité par Gilles Trequesser
Comme les insurgés syriens, les réfugiés sont pour la plupart de confession sunnite et leur présence n'est pas du goût des Turcs d'origine arabe issus comme le président syrien de la minorité alaouite.
Ces derniers sont en outre de plus en plus critiques envers une administration turque qui a pris fait et cause pour les rebelles, parmi lesquels figurent des extrémistes islamistes.
Pour la plupart des alaouites de la province d'Hatay, qui affiche une mixité confessionnelle sans équivalent dans une Turquie très majoritairement sunnite, le conflit n'affecte pas encore les relations entre les différentes communautés.
Mais certains craignent des représailles et d'autres font d'ores et déjà état d'incidents entre sunnites et alaouites. Selon l'un d'eux, des villages à dominante alaouite auraient même commencé à stocker des armes.
Le discours des autorités syriennes, qui parlent d'une campagne "terroriste" menée au détriment des minorités religieuses, trouve un écho particulier chez les alaouites de Turquie. A leurs yeux, Ankara joue la carte confessionnelle en apportant son plein soutien aux représentants de l'opposition et aux déserteurs, dont certains ont trouvé refuge en Turquie.
"Le gouvernement turc s'imagine-t-il vraiment que tout le monde l'aimera quand ce sera fini? La guerre ne débutera vraiment qu'avec le départ d'Assad", dit Aydin, un commerçant alaouite d'Antakya, l'Antioche biblique, chef lieu de la province d'Hatay.
"Le gouvernement joue un jeu sectaire ici. Il essaie de diviser notre communauté. Jusqu'ici, être sunnite, alaouite ou chrétien n'avait aucune importance, poser la question était déjà déshonorant, mais les choses changent", regrette-t-il.
ANIMOSITÉ
Le gouvernement turc semble toutefois soucieux de désamorcer les tensions religieuses. Des réfugiés en situation irrégulière auraient ainsi été invités à quitter la province de Hatay et des mesures prises pour empêcher les rebelles de s'y replier.
Une rencontre entre représentants de l'insurrection prévue à Antakya le mois dernier a en outre été annulée et l'Armée syrienne libre (ASL) a fait savoir que son état-major, qui se trouvait dans la province, avait été relocalisé dans l'un des secteurs "libérés" de Syrie.
La région, qui faisait jadis partie du territoire syrien, est en proie aux tensions communautaires depuis que le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, autrefois proche allié d'Assad, lui a enjoint l'an dernier de se retirer. La situation s'est ensuite détériorée avec l'arrivée de dizaines de milliers de réfugiés fuyant les combats du nord de la Syrie.
Cent mille d'entre eux vivent désormais dans des camps de fortune côté turc et des dizaines de milliers d'autres sont en situation irrégulière dans la zone frontalière.
"Il y a tellement d'étrangers ici qu'on ne sait même plus qui ils sont. Ils errent avec leurs longues barbes. Certains ne sont même pas Syriens. Un regard suffit pour se rendre compte que ce sont des tueurs. Est-ce qu'on veut vraiment qu'ils accèdent au pouvoir en Syrie?", s'indigne Aydin.
L'animosité vaut aussi en sens inverse. Ainsi, un opposant syrien chargé de la coordination des soins aux réfugiés a-t-il refusé de laisser une infirmière s'occuper de l'un des blessés qu'il avait conduits dans un hôpital local.
"Je ne veux pas qu'elle le soigne. C'est une alaouite. Ce sont tous des espions", a-t-il déclaré.
Près de la moitié des 1,5 million d'habitants de la province d'Hatay sont de confession alaouite. La région a été rattachée à la Turquie après un référendum organisé en 1939, alors que la Syrie était sous mandat français. Elle possède également des communautés catholique, protestante, orthodoxe et juive.
Jean-Philippe Lefief pour le service français, édité par Gilles Trequesser
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