jeudi 20 septembre 2012

Du logement au pavillon : la vie rêvée des Turcs de Vierzon


Par Fouad Bahri | ZAMAN FRANCE jeu, 20/09/2012 - 14:27


Depuis le lancement de la politique de la ville, il y a plus de vingt ans, le renouvellement de l’habitat urbain a été perçu comme l’un des outils privilégiés pour décloisonner les cités-ghettos. A Vierzon, dans le Cher, les Franco-turcs passés d’un logement HLM classique à un pavillon, ont eux aussi bénéficié de ce changement de vie.

De 20 à 25 % ! Le taux obligatoire de logements sociaux dans les communes vient d’être relevé par les sénateurs le 12 septembre dernier lors de l’examen du projet de loi sur le logement social. Mentionné dans la loi SRU (Solidarité et Rénovation urbaine), ce dispositif est l’un des plus importants de la politique de la ville mise en place dès 1991 et dont l’objectif était d’assurer une mixité sociale et une diversité de l’habitat afin de lutter contre les phénomènes d’exclusion dans l’espace urbain. Changer la vie des habitants de quartier en changeant leur habitat, l’idée semble ingénieuse. A Vierzon, dans le département du Cher (18), les habitants de la cité Henri Cellier ont pu s’en rendre compte. Soumis à un projet de réhabilitation urbaine voté en 2007, les logements de l’Office Public de l’Habitat (OPH) ont été démollis et remplacés par des habitations pavillonnaires, toujours sous un régime locatif.

Des pavillons pour endiguer la délinquance
Pour les Franco-turcs de Vierzon, cet accès à un nouveau cadre de vie était inespéré. Volkan Simsek, 31 ans, ouvrier en bâtiment et père de trois enfants, a grandi dans ces logements HLM. Depuis 2009, il vit dans l’un des pavillons de l’OPH. «On se sent comme des propriétaires, on est pas mis à l’écart. Avant, on se voyait comme des gens de seconde catégorie avec les HLM» dit-il. Volkan a senti en particulier l’évolution de la vision des Turcs quant à leur place dans la société française. «Les gens changent de mentalité. Ils avaient tendance à être nostalgiques et à dire "ah le bled, ah la Turquie". Là maintenant, on se sent bien» dit-il. La destruction programmée des cité-ghettos, à Vierzon comme ailleurs, obéit aussi à un autre objectif : prévenir les phénomènes de concentrations urbaines qui produisent de la tension sociale et parfois de la délinquance. C’est l’une des raisons qui a poussé Deniz Olmez, 33 ans, mère de deux enfants, a demandé très tôt un logement situé à l’extérieur du quartier Henri Cellier «pour m’éloigner de ce milieu de cité et avoir un environnement tranquille». «Si les sociétés HLM ont décidé de détruire ces bâtiments, c’est pour éliminer la délinquance et les lieux de squatt» témoigne cette Franco-turc qui vient d’obtenir un logement pavillonaire à proximité mais en dehors de son quartier d’enfance. Paradoxalement, la démolition des autres bâtiments a accéléré son désir de partir ailleurs. En effet, «au fur et à mesure que les autres bâtiments ont commencé à être démollis et que leurs habitants partaient en pavillons, beaucoup de jeunes de 18/25 ans sont venus se poser dans le pallier» ajoute-t-elle évoquant des problèmes de places de parking squattées et de tapage nocturne. «Vivre dans un milieu calme» avec un bon voisinage fait donc partie des exigences de Deniz qui espère offrir à sa famille une autre vie. «J’ai un enfant qui est très influençable. Je ne veux pas qu’il grandisse là où j’ai grandi» explique-t-elle.

«Ces quartiers peuvent être des atouts formidables»
Ces considérations sécuritaires, Volkan Simsek les partage lui aussi. «On est plus en sécurité. On vit mieux qu’avant. On est quand même dans un quartier où à partir d’une certaine heure, on peut plus sortir dehors » précise le Franco-turc qui estime qu’avec ces nouveaux logements, «il y a un peu moins de problèmes de délinquance». Pour autant, toute la politique de la ville ne se réduit pas à la question du logement. D’après Nicolas Sansu, maire communiste de Vierzon, la dimension économique et sociale du réaménagement urbain reste essentielle dans le décloisonnement des quartiers populaires. «Ce n’est pas qu’un problème urbain, il y a aussi la question de l’emploi et du pouvoir d’achat. Même si les pavillons remplace les HLM, le problème du vivre-ensemble subsiste» dit-il. Pour l’élu communiste, le plus important «est de faire de l’activité et de montrer que ces quartiers peuvent être des atouts formidables». Une nouvelle zone économique comportant notamment une usine Renault et un grand laboratoire d’analyse médicale de dimension régionale a ainsi été financée pour créer du lien et ouvrir ces habitations au reste de la ville, dans une commune où 65 % des habitants sont propriétaires.

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