Encore peu nombreuses en France, les entreprises turques s'intéressent surtout à la région parisienne. Elles s'appuient sur de puissantes fédérations professionnelles pour accélérer leurs investissements.
La France ne compte qu'une petite cinquantaine d'entreprises turques dont les effectifs cumulés ne dépassent pas 1.500 personnes mais elle les attire puisqu'elles n'étaient que 30 en 2010. Avec des fortunes diverses. Sans remonter à l'échec du distributeur turc Sinan Solmaz dans la reprise du verrier Duralex, l'équipementier automobile Orhan Holding n'échappe pas aux difficultés de son secteur. La firme familiale, dont la filiale française est basée à Poissy (Yvelines) au plus près de ses principaux clients locaux, procède actuellement, sous l'égide du gouvernement, à un audit de son usine Nobel Plastiques de Vitry-le-François (Marne) dont 200 des 460 emplois pourraient être supprimés sur les quatre prochaines années.
Cela n'a pas empêché un autre équipementier automobile turc, Martur, d'installer un centre de recherche à Vélizy-Villacoublay (Yvelines) pour développer des composants de sièges auto. Il pourrait embaucher à terme une soixantaine de personnes. Pour sa part, le constructeur d'autocars et de blindés Otokar, filiale du conglomérat Koç, a implanté son siège Europe à Roissy (Val d'Oise) avec la ferme volonté de développer ses parts de marché dans les bus urbains et le ramassage scolaire. Le même conglomérat Koç est également présent en France depuis une vingtaine d'années avec son groupe d'électroménager Beko. Son concurrent Vestel dont les activités s'étendent à l'électronique grand public, s'est lui aussi implanté en France pratiquement en même temps.
Un intérêt particulier pour les sociétés en difficultés
«Les principaux secteurs dans lesquels les Turcs ont investi récemment en France sont le textile, le matériel médical, la sous-traitance automobile, la logistique et la machine outil avec un fort intérêt pour les sociétés en difficultés qui ont des marques », note Géraldine Filippi représentante de l'Agence française pour les investissements internationaux (AFII) à Istanbul.
Toutes n'ont pas encore sauté le pas mais nombreuses sont celles à s'intéresser au marché français à l'image du fabricant de tapis Royal Hali qui dispose d'une usine ultra-moderne à Gaziantep, tout au sud du pays à la frontière syrienne. Il travaille déjà pour Pierre Cardin et pour un géant français du tapis mais compte bien sur la flexibilité de son outil industriel pour développer bien davantage ses activités en France.
A quelques kilomètres de là, dans la même ville, les groupes Şireci, Ozberkler et Aydemir se sont unis pour se diversifier. Ils viennent d'investir plus de 11 millions d'euros dans SolarTurk, une usine de panneaux solaires destinée à accompagner la montée en puissance de cette énergie en Turquie... mais aussi susceptible d'être un jour éligible à des marchés européens.
De puissantes organisations professionnelles
La mission en Turquie effectuée mi décembre par l'association d'entreprises Paris Ile de France Capitale Economique (PIDFCE) témoigne de ce fort appétit d'investissements en France, particulièrement en région parisienne. Pierre Simon, président de l'association, explique ce succès par le fait que Paris, avec ses TGV, son réseau routier et ses aéroports, « est la porte d'un marché de 500 millions de consommateurs ».
Surtout, les Turcs n'y sont pas dépaysés. Avec 13 millions d'habitants, Istanbul représente 43 % du PIB de la Turquie et investit 28 milliards d'euros dans ses transports en commun. Un rôle dans le pays qui présente de très fortes analogies avec le Grand Paris. « Nous investissons 3,5 milliards d'euros en 2013 dans les transports, les infrastructures, l'environnement et plus généralement tous les systèmes nécessaires à une ville de cette dimension, nous coopérons d'ailleurs très étroitement avec Paris », rappelle Kadir Topbas le maire d'Instanbul.
Un enjeu qu'ont très bien saisi les hommes d'affaires turcs qui, pour réaliser leurs projets, s'appuient désormais sur de puissantes organisations professionnelles comme la Fédération d'entrepreneurs et de dirigeants de France (FEDIF) et sa composante Fatiad (entrepreneurs franco-turcs) ou encore la Confédération des hommes d'affaires et industriels turcs Tuskon dont les travaux s'inscrivent résolument dans le long terme et n'hésitent pas à bousculer le patronat traditionnel turc.
(à Gaziantep et Istanbul)
DOMINIQUE MALÉCOT
Légendes photos.
Royal Hali utilise un procédé de tissage qui permet de varier les motifs sur le même métier et un système de sérigraphie qui permet de personnaliser à l'extrême les tapis. (Photo Dominique Malécot)
En cours de démarrage, l'usine de panneaux solaires SolarTurk se double de la société d'ingénierie TurkSolar chargée de mettre en oeuvre ses techniques, (Photo Dominique Malécot)
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