Par Fouad Bahri | zaman france jeu, 13/09/2012 - 14:02
Initiée en 2002 autour du rapport Debray, la question de l’enseignement du fait religieux à l’école peine à s’imposer en France. A l’IESR, on considère pourtant que cet enseignement de nature laïque est nécessaire aux élèves et peut permettre de prévenir une communautarisation de leurs relations à l’école.
Alors que le débat lancé par le ministre de l’Education nationale Vincent Peillon sur la morale laïque bat son plein et que 91 % des Français y sont favorables, la question de la religion à l’école pourrait paradoxalement refaire surface. Un enseignement de la religion à l’école est-il possible et sur quels critères ? C’est, notamment, à ces délicates questions que tâchera de répondre le colloque «Ecole et enseignement des faits religieux : objectifs et programmes» qui se tiendra le 20 septembre au Centre international d’études pédagogiques de Paris. La question n’est pas nouvelle et, à vrai dire, cet enseignement est déjà présent dans les programmes scolaires, réparti principalement dans les disciplines de l’histoire et du français.
Pas de restauration religieuse
Rejetant d’emblée toute forme de démarche identitaire et communautaire, Philippe Gaudin, philosophe et responsable formation recherche à l’Institut européen en sciences religieuses lié à l’Ecole pratique des hautes études, considère au contraire que seule une approche «savante», laïque et distanciée peut être à même de refonder une culture commune. Le philosophe estime même qu’un enseignement du fait religieux peut être un vecteur efficace de décommunautarisation des élèves. «L’enseignement du fait religieux ne peut pas être instrumentalisé pour résoudre les problèmes engendrés par le pluralisme religieux. [Il faut] désolidariser ce phénomène identitaire qui voudrait qu’un individu soit réductible à ses origines ou sa religion. L’islam n’appartient pas aux musulmans, ni le judaïsme aux juifs, ce sont des objets de connaissance» dit-il. Pour Philippe Gaudin, l’enseignement du fait religieux n’est lié à aucune démarche nostalgique ou de nature traditionnelle mais relève plutôt d’une exigence de renouvellement des savoirs. «Il ne s’agit pas de restaurer une culture religieuse mais de développer une connaissance des faits religieux et d’acquérir une nouvelle culture, celle dont on aura besoin demain» ajoute le responsable formation recherche à l’Institut européen en sciences religieuses.
Des recommandations peu appliquées
Dès le milieu des années 1980, un constat avait été fait par l’Education nationale quant à l’inculture relative des enseignants sur le fait religieux. Des lacunes furent observées, attribuées à une «conjonction entre la diminution de la pratique religieuse en France, et [l’arrivée] de nouveaux publics dans l’enseignement secondaire» explique M. Gaudin. Plus tard, en 2002, un rapport commandé au philosophe Régis Debray par l’ancien ministre de l’Education nationale Jack Lang dressa des premières recommandations. Y étaient préconisées une évaluation des programmes d’histoire, de géographie et de lettres, et la mise en place pour les élèves d’«itinéraires de découvertes» et de «travaux personnels encadrés». Concernant les enseignants, une formation était recommandée, tandis qu’était envisagée la création dans les IUFM d’un module «Philosophie de la laïcité et histoire des religions».
Harmoniser l’enseignement du fait religieux
Mais dix ans plus tard, seul un petit nombre de ces recommandations a été suivi d’effet. Philippe Gaudin est le premier à le reconnaître lorsqu’il considère que cet enseignement du fait religieux se fait toujours «d’une manière irrégulière dans le temps et l’espace». «Les plans académiques de formation sont différents même s’il y a des exigences nationales. Il y a aussi une grande disparité du point de vue des disciplines» avoue-t-il.
Paris
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