lundi 6 mai 2013

JUIFS, ARMÉNIENS… FRANÇAIS – La presse épinglée pour ses attaques contre les “ennemis des Turcs”


La fondation Hrant Dink, du nom du journaliste turc d’origine arménienne assassiné en 2007, alerte régulièrement sur les propos haineux publiés dans la presse du pays. Ces derniers restent répandus et s’attaquent en priorité aux minorités ethniques et sexuelles.
Le dernier rapport de la fondation Hrant Dink est inquiétant. D’après ce document, qui analyse une centaine de textes jugés “haineux” publiés au cours des quatre derniers mois de l’année 2012, plus de 25 % des attaques visent les Juifs et les Arméniens, suivis par les chrétiens et les Rums (grecs orthodoxes de Turquie). Les Français seraient le onzième groupe le plus attaqué depuis le vote de la loi réprimant la négation du génocide arménien, finalement censurée par le Conseil constitutionnel en février 2012.
Les minorités ethniques et religieuses ne sont pas les seules visées. Les articles homophobes sont également pointés du doigt : le rapport souligne que le fait de se revendiquer comme membre de la communauté LGBT en Turquie est ouvertement perçu comme une “perversion”, une “anormalité”, voire comme un équivalent à l’inceste par certains titres de presse.
Bellicisme et exagération
Certains évènements auraient favorisé de telles attaques. Le rapport cite notamment les relations de la Turquie avec l’OTAN, les attaques sur Gaza et la sortie du film islamophobe Innocence of Muslims. Les groupes visés sont souvent associés à la question kurde et perçus comme source du problème. Si le PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan) est pointé du doigt, les Kurdes seraient rarement la cible directe des attaques. Selon le rapport, “la haine est soigneusement cachée” et l’on assiste à “une différenciation entre ‘bons Kurdes’ et ‘les autres’”.
Le rapport distingue quatre catégories de discours haineux. La principale d’entre elles concerne le discours belliqueux visant une communauté (42 % des cas observés). Près de 27 % des attaques étaient des exagérations ou déformations du discours dans le but d’accabler un groupe ethnique. La fondation Hrant Dink a également recensé des blasphèmes ou insultes (17 % des attaques) et une utilisation de l’identité personnelle comme élément d’un discours haineux ou humiliant (7 %).
La presse nationale, première concernée
On peut lire de tels propos, d’après le rapport, principalement dans la presse nationale et dans les éditoriaux, et Istanbul est la province dans laquelle les discours haineux sont les plus répandus. Certains sujets sensibles favorisent l’expression du conflit, notamment la question kurde, la question chypriote et la laïcité. Selon la fondation Hrant Dink, les discours haineux avaient particulièrement augmenté entre 2011 et 2012 pour finalement stagner, voire baisser légèrement, mais en restant à un niveau beaucoup plus élevé que celui de fin 2011.
Il s’agit du troisième rapport de ce type. Le but affiché par la fondation Hrant Dink est de “mettre fin à la polarisation et à l’hostilité dans la société”. Yasin Hayal, l’instigateur de l’assassinat de Hrant Dink, avait affirmé ne pas connaître sa victime personnellement, mais avoir appris dans les journaux qu’il s’agissait d’un “ennemi des Turcs”.
Laurène Perrussel- Morin (http://lepetitjournal.com/istanbul.html) lundi 6 mai 2013

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