vendredi 26 avril 2013

Chez Eskici Irfan :


du tableau à 2 millions de dollars aux lettres d’amour de SuzanneVéritable caverne d’Ali Baba, l’Eskici Irfan ne dévoile ses trésors qu’à ceux qui ont la patience de fouiller, de voir le beau là où d’autres ne voient que des vieilleries. Irfan Çalıʂkan est à l’image de sa boutique : à la fois funky, sérieux et plein d’anecdotes qui ont parfois des allures de légendes, il est plus connu dans le voisinage sous le nom d’Irfan Abi.
Lepetitjournal.com d’Istanbul : Quand et comment votre boutique est-elle née ?
Irfan Çalıʂkan : Il y a trente ans. J’ai choisi ce métier parce que c’est un travail de paresseux (rires). Je n’ai même pas besoin de nettoyer les objets que je vends parce que lorsqu’un client vient acheter quelque chose, il le dépoussière ! Enfin aujourd’hui, avec internet, il faut faire plus de recherches, se tenir au courant du marché. Par exemple je vendais des vieilles capsules Coca Cola à 1 ou 2 TL. Et je me suis rendu compte que sur internet cela se vendait beaucoup plus cher (autour de 30 $). J’aime aussi ce métier parce qu’il est plein de surprises, il suffit juste d’être patient. Parfois je ne vends rien pendant trois mois, puis un jour je fais une vente qui couvre ces trois mois de disette.
Où trouvez-vous tous ces objets ?
Lorsqu’une personne âgée meurt, les enfants ou petits-enfants se débarrassent de ses affaires. Les gens gardent ce à quoi ils vont pouvoir attribuer une valeur directe, et donnent le reste. Parfois, ils ne se rendent pas compte de la valeur de ce qu’ils laissent, ils ne sont pas conscients du potentiel. C’est un peu un métier de vautours (rires) !
Qui sont vos clients ?
La plupart des mes clients sont des chercheurs (historiens, journalistes…), des personnes qui aiment chiner, fouiller. Mais je vends aussi aux touristes.
Quelle est votre plus grosse vente ?
Je vends de petites choses à partir de 1 TL, mais un jour j’ai vendu un tableau d’Abramović pour 2 millions de dollars. Un pur coup de chance. Un voleur est entré par effraction dans une maison qui devait appartenir à des vendeurs d’héroïne. Sous un lit, il a trouvé le tableau et des kilos d’héroïne. Il a paniqué, laissé la drogue et pris le tableau. Lorsqu’il s’est fait arrêter, plus personne ne réclamait le tableau. Comme il ne savait pas quoi en faire, il me l’a donné.
Quels sont les objets qui ont le plus de valeur à vos yeux ?
Tout ce qui peut rapporter de l’argent (rires). Comme ces pièces de Byzance (cf photos ci-dessous). Ou cette affiche originale et peinte à la main qui date de 1951. Elle appelle les Juifs à aller en Israël, après la création de l’Etat. Elle mériterait d’être exposée dans un musée.
Le plus insolite ?
La plupart sont insolites. Mais j’ai par exemple des revolvers antiques tout rouillés (cf photo). Un jour, un journaliste grec en a acheté un. Je lui avais conseillé de le déclarer à la police avant de partir. Mais il ne l’a pas fait. Il s’est fait arrêté et est interdit de territoire pour cinq ans. Il a tenté de me faire un procès mais il a perdu. Il faut faire attention avec ces choses-là. J’ai aussi des manteaux de la Gestapo (photo de droite, FF), et autres vêtements anciens.
Qu’y a-t-il dans ce coffre en bois ?
Ce coffre est rempli de lettres, télégrammes et cartes postales. Il contient toutes les correspondances de la fille de l’ambassadeur de France du début des années 60, des lettres d’amour pour la plupart. Elle s’appelait Suzanne et s’est mariée à un Turc, Ahmet Arif Demirer. Ils se sont vraisemblablement mariés à Beyoğlu. Il semble que lui était banquier et journaliste. Ils ont vécu ici, à Istanbul, et y sont morts aussi. Il y a vraiment de quoi faire un film avec leur histoire !
Découvrez cette boutique pleine de surprises en images et en musique!

Propos recueillis par Fanny Fontan et Ali Yücel Doğan (http://www.lepetitjournal.com/istanbul) vendredi 26 avril 2013
Eskici Irfan
Büyük Parmakkap
ı Tel Sokak N°25 / Beyoğlu
0212 243 75 77 / 0539 835 40 02

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