Par Samet Altintas | zaman france ven, 24/08/2012 - 11:57




En 1927, les parlementaires turcs sous la bannière du député Ekrem Rize, ont voté une loi ordonnant le saccage et la destruction de tout objet symbolisant l’Empire ottoman. Une politique «injuste» à laquelle le chercheur Osman Öndes consacre tout un ouvrage intitulé Vurun Osmanli’ya (Lapider l’Empire ottoman).
Au moment de la fondation de la République turque, les objets ottomans ont commencé à être détruit un à un. Plusieurs éléments issus de l’héritage ottoman, y compris les inscriptions servant à la mémoire collective, ont été détruits. Les efforts pour rejeter l’héritage ottoman, qui ont commencé dès les premières années de la République, ont laissé de mauvais souvenirs dans la conscience anatolienne. Tout commence en 1927. Le député Ekrem Rize, lors de la deuxième Grande Assemblée Nationale Turque (TBMM), a rédigé une loi cette année-là pour détruire tout ce qui rappelait l’héritage ottoman du pays. Cette loi, qu’il a rédigée seul, est passée au Parlement après 73 sessions et a été promulguée dans le Journal officiel le 15 juin 1927. Aujourd’hui encore, elle est toujours en vigueur. Dans son discours, Ekrem Rize a soutenu que les monogrammes et les épitaphes des sultans datant de l’époque ottomane devaient être détruits. «Il y a le blason et les éloges funèbres d’un sultan sur le portail d’une école qui enseigne les valeurs de la République, ce n’est pas tolérable, et une telle excentricité ne peut exister dans un autre pays», a-t-il déclaré. Ekrem Rize était un pur ennemi du passé. Dans ses discours, il a décrit l’héritage ottoman comme une période pleine de meurtres et d’ambitions personnelles. A ses yeux, le sultan Mehmet le Conquérant était un homme ordinaire et il n’y avait pas lieu de le glorifier. Le chercheur Osman Öndes auteur de l’ouvrage Vurun Osmanli’ya (Lapider l’Empire ottoman), publié chez TIMAS, considère cette loi comme l’auto-négation d’une nation. Indiquant que la civilisation turque a connu une violente destruction de cet héritage pendant la période qui a suivi 1927, il décrit cette politique comme humiliante et dénigrante. L’auteur souligne par ailleurs que les documents qu’il a fournis dans son livre ne représentent qu’une petite partie de la destruction subie par Istanbul. «Au fur et à mesure que mes travaux avançaient, j’avais un sentiment désagréable. Je me suis demandé comment peut-on être si injuste ? Les sultans font partie de notre généalogie » écrit-il. «Nous nous sommes reniés en supprimant leurs monogrammes. L’histoire de notre nation commence-t-elle en 1923 ? Sommes-nous venus au monde à cette date ?», s’interroge encore Osman Öndes, ajoutant qu’il y avait également de grandes campagnes de destruction à Bursa et Edirne. A une période historique où le Parlement turc était occupé par les problèmes causés par ses ennemis extérieurs, Ekrem Rize appelait sans arrêt celui-ci à «anéantir tout ce qui rappelle les Ottomans».
Le maire d’Istanbul en infraction avec la loi
Conformément à la loi, les fonctionnaires de l’Etat n’ont pas le droit de travailler dans des bâtiments portant le blason ottoman, un monogramme de sultan ou toute autre inscription ottomane. Osman Öndes juge cette situation tragicomique. «Avec cette loi, le maire d’Istanbul ne peut travailler à la Sublime Porte car il y a des monogrammes et des inscriptions. C’est ironique mais le maire d’Istanbul est en infraction avec la loi» poursuit le chercheur turc. De même, la Mühendishane-i Berrî-i Hümâyûn (Ecole impériale militaire d’artillerie), construite par Selim II à Sütlüce, est actuellement utilisé en tant que bureau de recrutement et le portail principal du bâtiment porte un monogramme et des inscriptions ottomanes. «Dans ce cas, le ministre de la Défense est en infraction avec cette loi» déclare Osman Öndes.