Article paru dans le Petit journal d'Istanbul en octobre 2011
En 2004, à la faveur de la construction d’un tunnel sous le Bosphore et d’une station de métro attenante, des archéologues ont mis à jour un site exceptionnel sous le quartier de Yenikapı : l’ancien port byzantin dit “de Théodose”. Depuis, l’équipe de 550 personnes va de surprise en surprise
Vue générale du site de fouilles (photo AA)
Istanbul, août 2011. Malgré 35 degrés et sa place assise à l’ombre, Musa ne doit surtout pas dormir. Toutes les dix minutes, il arrose abondamment la coque en bois d’un navire qui a coulé juste ici, sous ses pieds, il y a seize ou dix-sept siècles. “Il est très beau, n’est-ce pas ?” interroge l'ouvrier, un sourire fier au coin des lèvres.
“Beau”, le mot est faible. La quille, d’une quinzaine de mètres de long, est restée quasiment intacte. Les archéologues n’ont pourtant retrouvé qu’une moitié du bateau, dans le sens de la longueur. A la surface du sol, on distingue des dizaines et des dizaines d’amphores.
35 épaves mises à jourMehmet Ali Polat est l’un des archéologues en charge de ces fouilles. “Nous avons compté entre 15 et 20 sortes d’amphores différentes. Cela montre que le bateau est arrivé jusqu’ici en voyageant de port en port. En analysant leur contenu, nous allons pouvoir déterminer sa feuille de route”, explique-t-il.
A la vue d’une telle abondance, les archéologues imaginent un naufrage causé par un déchargement raté. Ils ont inventorié des quantités de noyaux d’olives, de fruits et autres arêtes de poissons. D’après Mehmet Ali Polat, le bateau est tellement “exceptionnel” qu'il faut s’attendre à tout. “On retrouvera peut-être même le capitaine!” plaisante-t-il à moitié.
Ce navire est le 35ème mis à jour sur le site. Les archéologues savaient qu’un port byzantin se cachait sous ce quartier en bordure de mer, mais il a fallu attendre 2004 et le percement d’un tunnel sous le Bosphore pour que ces trésors émergent enfin.
A la vue d’une telle abondance, les archéologues imaginent un naufrage causé par un déchargement raté. Ils ont inventorié des quantités de noyaux d’olives, de fruits et autres arêtes de poissons. D’après Mehmet Ali Polat, le bateau est tellement “exceptionnel” qu'il faut s’attendre à tout. “On retrouvera peut-être même le capitaine!” plaisante-t-il à moitié.
Ce navire est le 35ème mis à jour sur le site. Les archéologues savaient qu’un port byzantin se cachait sous ce quartier en bordure de mer, mais il a fallu attendre 2004 et le percement d’un tunnel sous le Bosphore pour que ces trésors émergent enfin.
Le paradis des archéologues
“Nulle part dans le monde, on n’a trouvé d’épave si ancienne, si grande et si bien conservée, avec sa coque et son chargement”, s'enthousiasme Mehmet Ali. “D’habitude, on trouve une partie du chargement mais pas le bois, dévoré depuis bien longtemps par les vers. Ici, pour un archéologue, c’est le paradis !”
Le paradis, malgré les bruits de chantier du tunnel juste à côté. Et ce n’est pas tout : Au milieu du terrain de fouilles, l'archéologue pointe du doigt la zone Néolithique, mise à jour en 2007. “C’est le plus ancien site connu à Istanbul. On ne s’attendait pas à cela”, raconte-t-il avant d’ajouter, avec le même engouement: “Istanbul est l’une des plus grandes métropoles au monde et nous avons fait reculer son histoire connue de 750 ans avant Jésus-Christ à 6.500 ans avant Jésus-Christ !”
“Nulle part dans le monde, on n’a trouvé d’épave si ancienne, si grande et si bien conservée, avec sa coque et son chargement”, s'enthousiasme Mehmet Ali. “D’habitude, on trouve une partie du chargement mais pas le bois, dévoré depuis bien longtemps par les vers. Ici, pour un archéologue, c’est le paradis !”
Le paradis, malgré les bruits de chantier du tunnel juste à côté. Et ce n’est pas tout : Au milieu du terrain de fouilles, l'archéologue pointe du doigt la zone Néolithique, mise à jour en 2007. “C’est le plus ancien site connu à Istanbul. On ne s’attendait pas à cela”, raconte-t-il avant d’ajouter, avec le même engouement: “Istanbul est l’une des plus grandes métropoles au monde et nous avons fait reculer son histoire connue de 750 ans avant Jésus-Christ à 6.500 ans avant Jésus-Christ !”
L'épave mise à jour cet été par l'équipe d'archéologues (photo AA)
Un cimetière néolithique
Sur le site, les archéologues ont trouvé les traces d’une vie agricole prospère, des restes d’élevage et des centaines d’objets de la vie quotidienne, comme des sandales en cuir ou des peignes en bois décoré. Mais en fouillant encore un peu, ils ont trouvé quelque chose d’encore plus époustouflant...
“Je vous présente le premier Stambouliote ! C’est une femme entre 25 et 30 ans. En fait, elle a 8.000 ans. Nous en avons trouvé huit comme ça”, précise Mehmet Ali Polat. Derrière lui, dans la position du fœtus, un squelette complet. Son équipe a tout simplement mis à jour un cimetière néolithique. A leur plus grande surprise, certains morts étaient enterrés entre des planches de bois.
“Nous avons aussi trouvé des traces d’incinération”, s’étonne l’archéologue. “Jusqu’ici, nous pensions que la crémation des morts avait commencé à l’âge du bronze. Nous, nous en avons trouvé à l’ère Néolithique !"
Sur le site, les archéologues ont trouvé les traces d’une vie agricole prospère, des restes d’élevage et des centaines d’objets de la vie quotidienne, comme des sandales en cuir ou des peignes en bois décoré. Mais en fouillant encore un peu, ils ont trouvé quelque chose d’encore plus époustouflant...
“Je vous présente le premier Stambouliote ! C’est une femme entre 25 et 30 ans. En fait, elle a 8.000 ans. Nous en avons trouvé huit comme ça”, précise Mehmet Ali Polat. Derrière lui, dans la position du fœtus, un squelette complet. Son équipe a tout simplement mis à jour un cimetière néolithique. A leur plus grande surprise, certains morts étaient enterrés entre des planches de bois.
“Nous avons aussi trouvé des traces d’incinération”, s’étonne l’archéologue. “Jusqu’ici, nous pensions que la crémation des morts avait commencé à l’âge du bronze. Nous, nous en avons trouvé à l’ère Néolithique !"
L'un des squelettes découverts dans le cimetière daté de l'ère Néolithique (photo AA)
Bientôt un archéo-parcAutant dire que ce site remet en cause l’histoire d’Istanbul et même un peu, l’Histoire tout court, telle qu’on la connaissait jusqu’alors. Les fouilles de Yenikapı durent depuis sept ans, sans interruption, et dureront le temps qu’il faudra, d’après Mehmet Ali Polat. En archéologie, c’est exceptionnel, d’autant que le site est au cœur d’un quartier, au beau milieu d’une ville de plusieurs millions d’habitants. Et pourtant, rien n’est visible de l’extérieur. Un panneau à la grille annonce seulement… la construction d’un métro.
“Il faudrait parler davantage de ces fouilles aux Stambouliotes”, estime Mehmet Ali Polat. “Ils doivent connaître l’histoire de leur ville. Après tout, nous ne travaillons pas que pour nos collègues archéologues.” Son souhait devrait un jour être exaucé. La mairie d’Istanbul songe à construire un archéo-parc pour exposer ses plus belles trouvailles. L’appel d’offre a déjà été lancé.
“Il faudrait parler davantage de ces fouilles aux Stambouliotes”, estime Mehmet Ali Polat. “Ils doivent connaître l’histoire de leur ville. Après tout, nous ne travaillons pas que pour nos collègues archéologues.” Son souhait devrait un jour être exaucé. La mairie d’Istanbul songe à construire un archéo-parc pour exposer ses plus belles trouvailles. L’appel d’offre a déjà été lancé.
Anne Andlauer (www.lepetitjournal.com/istanbul) jeudi 20 octobre 2011
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